Quand pour la toilette, l’eau devint suspecte !

Dès le XVe siècle, l’eau devient suspecte. La toilette devient sèche, la peau est perçue comme perméable aux humeurs et favorisant l’introduction de germes. Entre le XVIe et le XVIIe siècles, le bain public disparaît, entrainant dans son effacement celui du bain privé. Le standard devient la toilette sans eau, basée sur le changement fréquent du linge de corps, absorbant la sueur.

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Commence alors le règne de la toilette sèche

Le bain est remplacé par des frottements du corps et des « essuiements » du visage et des mains avec des serviettes imprégnées d’esprit de vin. L’apparence et la parure priment sur l’entretien du corps. Parfums, poudres et perruques deviennent alors les outils d’une hygiène d’apparat. On ne sait pas encore se laver les dents, ni faire sa toilette intime, ni…

Le renouveau du bain

L’avènement de la philosophie des Lumières au XVIIIe siècle marque le retour au naturel, au sensible et à l’intimité. À ceci s’ajoutent les prémices d’une hygiène de vie fondée sur les exercices physiques et la pratique des bains de propreté… Soutenus par l’utilisation du savon pour ses bienfaits. Rousseau, Diderot et Voltaire en France, Locke en Angleterre et Basedow en Allemagne diffusent ce nouveau courant de pensée dans leurs ouvrages… D’autant que, grâce aux avancées scientifiques, les médecins y ajoutent leur caution. Vont ainsi cohabiter bains privés et bains publics.

À cette époque, rien n’a encore été entrepris pour amener l’eau à domicile. La nouvelle mode de recevoir dans son bain relève d’un luxe seulement accessible aux plus aisés, valorisant ainsi son haut rang. On y boit le thé, on y discute, on y lit… Mobile, la baignoire permet de prendre son bain dans n’importe quelle pièce de l’habitation. Plus pratiques et nécessitant moins d’eau, des mobiliers pour bains partiels se développent… Notamment à but thérapeutique : bains de pieds, de bras, de siège.

Les meuble de toilettes font leur apparition

En marbre dans la Rome antique, en bois cerclé de fer au Moyen Age… La baignoire au XVIIIe siècle devient un véritable meuble en cuivre puis en zinc. Celle-ci est mobile et peut se dissimuler en méridienne ou en sofa. Certaines baignoires ont même déjà un réchaud, comme celle dans laquelle Marat s’est fait assassiner. La corporation des «porteurs d’eau», née en 1292, connaît un développement sans précédent. De 20 000 porteurs en 1789 à Paris, l’effectif augmente jusqu’à 600 000 en 1819. Sans eau courante, prendre un bain est un véritable luxe. Il faut alors puiser l’eau, la transporter, la faire chauffer, remplir la baignoire, la vider sans tout-à-l’égout, et bien sûr, sans salle de bains.

L’autre pièce maitresse du mobilier de bain est la table de toilette sur laquelle se trouvent aiguière et bassin. Ce meuble d’ébéniste à tiroirs et compartiments sert surtout aux ablutions du visage et des mains. Au XXe siècle, son évolution donnera naissance à la table-lavabo, recouverte de marbre, permettant de se laver le haut du corps. Plus ou moins luxueux, des établissements nommés bains publics proposent à la bourgeoisie naissante un éventail complet d’activités et de soins : bains chauds, bains froids, bains de vapeur, piscines, douches… Tout est prévu pour prendre soin de son corps en toute convivialité. À la fin du XVIIIe siècle, une dizaine d’établissements situés principalement le long de la Seine se partagent la clientèle essentiellement bourgeoise. Au siècle, les bains publics connaissent un succès considérable, approchant les 200 en fin de siècle.

Le bidet

Au XVIIIe siècle apparaît le bidet, nommé aussi « petit indiscret », « boîte à violon », « petit cheval hygiénique » en Italie. Mais au cours du siècle, les fabricants transforment les bidets en véritables meubles. Au début du siècle, l’objet deviendra synonyme de féminité. Si le bidet fut adopté dans le sud de l’Europe, il ne fut jamais accepté en Angleterre ou aux États-Unis… Trainant une réputation d’objet incorrect.

L’art et le bain

Le bain est traditionnellement représenté de la Renaissance au siècle au travers des thèmes mythologiques et bibliques, bains souvent épiés et surpris. Un rien frivole et libertin, le XVIIIe siècle s’ouvre aux représentations plus intimes. Privilégiant la transparence des étoffes et des attitudes légères.

Elle était dans la posture la plus séduisante, et la baignoire n’étant qu’à moitié pleine. Je pouvais jouir de tous les attraits d’un corps de Vénus, sans que le liquide qui la recouvrait comme une gaze légère pût rien dérober à mes avides regards…Voulez-vous savoir comment était composé le bain préféré de Marie-Antoinette ? Une décoction de serpolet, feuille de laurier, thym sauvage, à laquelle on ajoutait un peu de sel marin.

Quant à Mme Tallien, elle affectionnait particulièrement les bains aux fraises écrasées, mélangées à des framboises très mûres. 20 livres de fraises et 2 livres de framboises lui rendaient la peau plus douce que du velours. Law, le fameux financier, avait coutume d’ajouter à son bain d’eau parfumée, les jaunes de cent œufs! Parfois, il se servait de bouillon de veau. Et ce fut lui qui préconisa et lança la mode des minces tranches de veau appliquées sur la peau pour améliorer et adoucir le teint. Quelle coquetterie pour un financier !